Être un Jean Ridoux [ètr ê Zâ ridu]

Être un Jean Ridoux

Fig. A. Le bedeau carillonnant.

[ètr ê Zâ ridu] (loc. moq. ÉGLIS.)

Quand elle était encore au centre du village, cernée par le Balto et la mairie républicains, l’église prenait soin de ses paroissiens les moins bien dotés côté jugeotte en leur confiant de menues tâches comme balayer la sacristie ou sonner l’angélus.

Ainsi, souvent, le bedeau n’était pas parmi les plus futés du canton et la moquerie populaire le prenait-elle pour cible sans le désigner nommément, peut-être par sursaut de charité chrétienne.

Il existe une seule exception connue à cette délicatesse : elle concerne Jean Ridoux, marguillier de Saint-Cloud, qui donnera naissance, à son corps défendant, à l’expression être un Jean Ridoux.

Être un Jean Ridoux, marguillier de Saint-Cloud, dans un premier temps puis être un Jean Ridoux tout court, désignera donc le niais dont il est facile de se moquer puisqu’il n’entend pas la malignité qui se cache derrière le quolibet qui reprend son état civil. En tout instant Jean Ridoux rit ou sourit; un peu bêtement certes, mais il en est ainsi.

En tout instant Jean Ridoux rit ou sourit

Sans que l’on puisse précisément retracer le vie du bonhomme, l’on sait qu’il sonnait les cloches déjà au XVIIpuisqu’être un Jean Ridoux apparaît dans le fameux ouvrage du linguiste Antoine Oudin paru en 1640, Curiosités françoises, pour servir de complément aux dictionnaires, ou recueil de plusieurs belles propriétés, avec une infinité de proverbes et de quolibets pour l’explication de toutes sortes de livres.

Selon certains être un Jean Ridoux inspirera Victor Hugo lui-même pour le personnage de Quasimodo, mais le grand homme n’utilisera pas l’expression dans son roman Notre-Dame de Paris renvoyant au rang de querelle d’Allemands cette supputation qu’il nous fallait cependant signaler.

Peu à peu être un Jean Ridoux s’adressera à tout idiot du village réel ou supposé, qu’il soit employé du dioscèse ou non, connaissant un succès tel que le patronyme s’avérera difficile à porter pour les Ridoux de France et notamment les Jean que l’on compte par dizaine de milliers dans les temps surannés.

Fig. B. — Ouh t’es un Jean Ridoux-heu, marguillier de Saint-Cloud-heu !

Bien heureusement l’arrivée des Kévin modernes rendra désuet ce Jean d’antan, et concomitamment poussera être un Jean Ridoux vers le genre suranné.

Aucun être un Kévin Ridoux ne viendra remplacer le Jeannot au clocher ou sous les lazzi de la foule. Il s’en est fallu de peu qu’à nouveau un prénom et un nom soient moqués.

 

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