[prâdr yn bénédiksjô de parad] (loc. corp. CIRQ.)
L‘échantillon burlesque des clowns, la démonstration de force des acrobates, l’avant-goût de la férocité des fauves de la ménagerie, l’entre-aperçu de cette attraction unique au monde venue spécialement des Amériques, sont offerts aux habitants ébahis par les saltimbanques lors de leur parade pré-spectacle.
Le cirque n’est pas bégueule et il déballe la marchandise sans pudeur lors de ce défilé qui transformera les enfants en d’impitoyables prescripteurs comme on ne dit pas encore dans ces années surannées puisque la mercatique n’y est pas une science.
Viens voir les comédiens, voir les musiciens, voir les magiciens
C’est lors de ce tour d’échauffement que prendre une bénédiction de parade voit le jour, en référence aux coups de pieds aux fesses que se balancent les plus rigolos de la bande que sont Gugusse et le clown blanc, le premier se voyant généralement corrigé par les souliers taille 62 en séant du second pour lui avoir fait le coup de la fleur qui arrose.
Dès lors, colportant par monts et par vaux l’expression, les comédiens, les baladins, les tabarins, vont assurer à prendre une bénédiction de parade un succès équivalent à celui du gag du coussin péteur ou du numéro de l’ours jongleur. Grâce à eux, à chaque fois qu’un vaurien subira une admonestation dans la lune nécessaire à sa réorientation dans le droit chemin, on dira qu’il prend une bénédiction de parade.
Notons que malgré la vigueur du processus pédagogique, il est accordé comme un bienfait : c’est là le sens du terme bénédiction qui teinte d’une once de morale biblique ce qui, bien des années plus tard, s’apparentera à une violence corporelle interdite par la loi (mais ceci est une autre histoire).
Prendre une bénédiction de parade s’effondrera quand le cirque se contentera d’une camionnette rouge et jaune surmontée d’un mégaphone grésillant pour tout défilé censé affrioler les foules. Pour d’obscures raisons de rentabilité ou de sécurité il n’est en effet plus question de faire se balader lions et homme le plus fort du monde dans les rues de la ville…
L’expression rejoint alors dans l’oubli les coups de pieds au cul qui se perdent et la giroflée à cinq pétales, et ce ne sont pas les garnements modernes qui s’en plaindront puisqu’elle leur laisse ainsi le champ libre pour, eux, faire le cirque.