[ètre pôpèt] (loc. fém. ALCOOL.)
Jugée trop orientée du côté de l’ivresse masculine et de ses incontournables débordements¹, la très officielle échelle surannée de la soûlographie fut mâtinée en son temps d’une touche destinée elle aussi à dépeindre avec subtilité l’euphorie facétieuse qui guette la gent féminine sous influence d’un Côte du Rhône de bonne année ou d’un Sex on the Beach bien tassé.
La douceur et la légèreté d’être pompette furent ainsi choisies par un comité adéquat, être chiffonnée s’avérant un tantinet trop descriptive et être casquette nettement moins distinguée.
Certains linguistes attribuent aux exploits élyséens de Marguerite Steinheil, dite Meg, dite la pompe funèbre, et aux opposants du président Félix Faure célébrant sa disparition en goulues libations, l’émergence d’être pompette, mais ces experts de la langue apportent si peu de preuves à leur thèse que celle-ci ne saurait être retenue en ces lignes.
Il est plus vraisemblable qu’être pompette ne doive son existence qu’à son -ette final qui lui confère la délicatesse suffisant à faire passer une biture pour un infime émoi des sens, une femme ne pouvant s’avérer beurrée comme un Petit-LU, bienséance des temps surannés oblige.
Quoi qu’il en soit, être pompette est à l’enthousiasme alcoolisé ce que l’applaudissement est à un but de la tête en finale de coupe du monde à la 89e minute : une marque à peine visible de l’excitation interne et du chambardement neuronal en cours, une pudeur inutile, un ultime scrupule qui bientôt volera en éclats.
Les études montrent en effet qu’être pompette n’empêche en rien de se lancer dans une bataille de Reichshoffen² (revisitant sur des chaises martyrs la fameuse charge des cuirassiers Français face aux Prussiens le 6 août 1870), dans une lambada chaude comme un été 1989 voire une interprétation complète des succès de la Compagnie créole.
Être pompette est un fard doucereux comme seule la langue d’antan sait en produire pour draper ses effets.
La loi du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme, dite loi Évin, fera d’être pompette une expression bannie et vouée à l’oubli en surannéité.
Maîtresse de ses passions, la moderne ne carbure plus à la rincette, au rogomme ou à l’éthanol distillé dans la cave.
Demeurent cependant quelques rares noceuses n’ayant pas totalement oublié de leurs années passées l’art du langage et celui de la bamboche arrosée doucettement, mais ceci est une autre histoire.