[bit a Zanpjèr] (arg. polic. MATR.)
LES CHAGRINS y verront un symbole érigé en hommage à la virilité supposée nécessaire au maintien de l’ordre républicain.
Il faut en réalité lire dans cette autant étrange que désuète bite à Jean-Pierre toute la dérision qui taraude le gardien de la paix dont elle est le prolongement prépotent depuis 1897 que le préfet Lépine la lui a confiée.
En décidant de dérouiller le manifestant agité ou l’agitateur manifeste avec la bite à Jean-Pierre, le pandore souligne en effet qu’il lui en coûte de manier le bâton. Derrière la gaudriole c’est sa pudeur qu’il voile.
Il eût été facile pour lui de se contenter de l’appellation régulière de matraque et d’asséner ses cinq cent dix-huit grammes réglementaires sur la tête du grognon, mais il ne l’a pas fait. En préférant sortir la bite à Jean-Pierre dont les cinquante cinq centimètres disent plus qu’il n’en faut sur le quidam qui lui confia son prénom, c’est sa verve que le compagnon républicain de sécurité pose sur la table : il est là, il est nu.
Avec la bite à Jean-Pierre, c’est sa verve que le CRS pose sur la table
Que celui qui pensait le policier imperméable à l’humour et aux lettres se ravise; la bite à Jean-Pierre conjugue respect du règlement et créativité de la maison poulaga. Il n’y a pas que chez le brigand qu’on rouscaille bigorne.
Tournicotant élégamment maniée par l’hirondelle du quartier, la bite à Jean-Pierre s’imposa donc sur le terrain comme dans le langage pendant ces années où la police faisait dans la proximité.
À Ménilmuche tout comme à la Bastoche, le poulbot grandissait en craignant que le roussin ne le corrige la bite à la main. S’il commettait un larcin il savait qu’un bon coup de bite à Jean-Pierre pouvait lui indiquer le droit chemin.
Cette conception de l’ordre et sa méthode sans fard allaient se heurter de plein fouet à la confusion du moderne (flic et voyou) pour ce qui est des figures du discours.
Désormais quand on passe à table c’est qu’il est l’heure de manger, pas d’avouer un crime. Autant dire que Jean-Pierre avait tout intérêt à ranger son viril attribut sous peine de se retrouver lui aussi au violon.
Remplacée par un Bâton de Police à Poignée Latérale beaucoup plus facile à empoigner grâce à son court BPPL, la bite à Jean-Pierre rejoignit au rang des expressions surannées celle de la grosse dite « à Dudule » dont les exploits ne se chantent guère plus, eux non plus (mais ceci est une autre histoire).