Locution zoologico-coïtale pour désigner une activité sexuelle frénétique, répétée, rapide et peu subtile, généralement masculine

Fig. A. Post coïtum animal triste.
[bɛ.ze kɔm œ̃ la.pɛ̃] (SEX. RAPID.)
Le lapin, cet animal mignon des livres pour enfants, est aussi — dans le langage populaire des temps où l’on sait le prendre — un symbole incontrôlé de copulation effrénée.
L’observateur attentif du coït lapiniste sait bien que quelques secondes suffisent à l’animal aux longues oreilles (comme on dit dans la marine) pour boucler son affaire, et c’est donc sans extraordinaire capacité d’extrapolation que la langue aura créé baiser comme un lapin.
On ne parle pas ici du lapin de garenne discret, ni du Panpan de Bambi, pas même de l’apeuré pris dans les phares d’une voiture braconnière, mais de son cousin survolté, l’étalon des clapiers, celui qui vit pour deux choses : manger de la luzerne… et forniquer. Beaucoup. Vite. Souvent.
Baiser comme un lapin c’est faire l’amour à un rythme endiablé, sans fioritures, sans tendresse excessive, dans une frénésie plus mécanique que romantique, plus biologique qu’émotionnelle.
Cette locution est utilisée avec une pointe de moquerie, parfois d’admiration ironique, mais toujours avec une connotation d’excès incontrôlé. Le lapin n’a pas de préliminaires. Il ne lit pas L’Art d’aimer. Il ne s’embarrasse pas d’une dîner aux chandelles et de tout le tralala avant de proposer la botte. Il va droit au but, et vite. Très vite. Il incarne l’instinct pur, brut, sans mise en scène.
Subtile qu’elle est, l’expression peut désigner un jeune couple en pleine phase de passion hormonale, un homme qui se vante de ses exploits répétés (réels ou fantasmés), une sexualité compulsive, sans retenue ni esthétique. Et une célérité masculine par trop hâtive à balancer la sauce, tant Pinouille est diligent côté purée.
On notera que cette expression a connu son heure de gloire dans les années où l’on causait encore dans des bistrots sans wifi, où les discussions de vestiaire étaient autorisées puisque ceux-ci étaient honteusement genrés et donc interdits à la gent antipode. Il faut aussi dire que baiser comme un lapin, malgré sa trivialité apparente, n’est pas tout à fait une insulte. C’est une expression demi-taquine, demi-constat biologique, qui prête aux protagonistes une énergie admirable… mais une sophistication discutable.
Elle s’est bien entendu vue reléguée dans les tiroirs du langage populaire, et remplacée par des équivalents plus crus, plus cliniques, ou plus métaphoriques (du style enchaîner les coups, avoir la dalle, ou avoir le feu au fion — mais là, on perd le charme bucolique du rongeur frétillant).
Poussé par les notifications vibrantes de son téléphone intelligent, l’érotomane moderne fait plutôt dans l’amour version tambour, version tambouille, version nature. C’est Panpan… mais dans un film interdit aux moins de 18 ans.
Ainsi ne sait-il pas qu’il baise comme un lapin, ce gavé de salades d’artichaut avec des fleurs de violettes à la graine de sésame qui mangeait déjà comme un lapin.