L'important c'est de participer et d'avoir une belle tête de vainqueur.
[avwar yn bèl tèt de vêkër] (loc. sport. JO.)
SYN. Avoir une tête de nœud.
Depuis 776 av. J.C., date de création des Jeux Olympiques, on sait que seul le vainqueur est beau et que l’essentiel n’est pas de participer mais de gagner.
Depuis la Grèce antique et ses concours sportifs pentétériques, ce vainqueur à la plastique magnifiée par une couronne de branches d’oliviers sacrés gagnera le cœur des hommes et des femmes et pourra ainsi se repaître de ses exploits sur la piste.
Avoir une belle tête de vainqueur n’a rien à voir avec ce triomphe là.
Avoir une belle tête de vainqueur est même un faux ami moqueur puisque l’expression stigmatise l’attitude godichonne du porteur de la poire susnommée.
Née le 24 juillet 1908, quelques années après les premiers Jeux Olympiques de l’ère moderne à Athènes (1896), avoir une belle tête de vainqueur est une pensée du baron Pierre de Coubertin extraite de son fameux discours sur l’idéal olympique (ce dont peu d’ouvrages se font l’écho) :
Certains y devineront une forme d’ironie puisque le perdant, deuxième, troisième, y est considéré comme ayant une belle tête de vainqueur alors qu’il est surtout gros-Jean comme devant avec son short ras les bonbons et son marcel moulant ridicule. D’autres y verront au contraire l’aura de la gloire touchant à la fois le premier et le dernier réunis par la communion de l’effort et de la transpiration.
Ce sont les premiers qui gagneront la querelle sémantique et feront donc d’avoir une belle tête de vainqueur l’expression désignant le benêt de service, y compris hors discipline sportive.
Le Comité International Olympique, soucieux de la valeur marchande de son image, fera cesser l’emploi d’avoir une belle tête de vainqueur¹ et l’enverra rejoindre le lointain souvenir des dieux du stade courant nus sous le soleil athénien.
À partir des Jeux Olympiques de Los Angeles (1984) et leurs deux cent vingt cinq millions de dollars (225 M$) de résultat engrangés par le CIO, on ne rigole plus avec avoir une belle tête de vainqueur. On n’est pas là pour la beauté du geste mais pour le flouze.
La langue surannée est priée de ne pas toucher au grisbi et d’employer une tournure comme avoir une tête de nœud si elle entend s’occuper des nigauds : c’est le fameux esprit de Coubertin.
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