Eh bien mon cochon [é bjê mô kòSô]

Eh bien mon cochon

Fig. A.  Fameux numéro de dressage.

[é bjê mô kòSô] (exclam. spont. GRUÏ.)
La domesticité du cochon étant avérée depuis au moins le neuvième millénaire avant J.C., il est bien logique que l’homme se soit mis à lui parler un jour ou l’autre, la proximité quotidienne permettant de cultiver un langage commun (et plus si affinités).

Le fameux numéro de dressage animal (cf. fig. A.) consistant à demander – devant un public ébahi – à un porcelet grouinant combien font trois fois trois, puis six plus trois, puis quinze moins six, puis dix-huit divisés par deux¹, n’entrant pas dans le cadre de notre étude, nous nous contenterons de nous pencher sur l’origine et l’usage de eh bien mon cochon dont il pourrait sembler de prime abord qu’elle est une expression destinée au porcin.

Il n’en est rien.

Eh bien mon cochon, formule d’intensité soulignant un constat laudateur ou réprobateur, s’adresse prioritairement à l’humain. Et plus particulièrement à celui qui a su bénéficier de circonstances favorables lui octroyant une part de gâteau que ses capacités cognitives ou dispositions naturelles ne laissaient pas supposer.

Eh bien mon cochon peut être par exemple émis à l’endroit de cet ancien camarade de lycée surnommé Commodore 64 en raison du nombre de boutons parsemant son visage à l’équivalent du clavier de l’ordinateur personnel le plus vendu au monde, lorsqu’il vous entretient des divers signes de cette réussite matrimoniale qui n’était pas acquise d’avance², ou encore décoché à destination d’une relation quelconque ayant visiblement profité d’un délit d’initié pour transformer un livret Écureuil en placement lucratif (à moins qu’il n’ait participé à un casse sans arme, ni haine ni violence).

Eh bien mon cochon sert ainsi prendre la mesure d’une démesure sans que l’interlocuteur ne se sente offusqué : une délicatesse qui fait tout l’honneur de la langue surannée.

Notons que l’expression n’existe pas au féminin³, et que eh bien mon cochon peut s’utiliser comme tel pour exprimer une admiration face à la performance d’une femme.

Effet de l’exode rural, le moderne devenu citadin ne souhaitera plus louer le cochon comme maître étalon de sa stupéfaction, ne voyant plus dans l’animal qu’un fangeux à garder loin de lui. Un rejet de ses racines qui le mènera à faire de eh bien mon cochon une expression surannée. La fin d’une amitié millénaire.

¹La réponse est toujours neuf-neuf-neuf, évidemment.
²C’est lui qui a épousé la blondinette atomique de 1ère B !
³Eh bien ma cochonne recouvre des dispositions qui relèvent d’une autre histoire.

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