Intervilles [ɛ̃tɛʁvil]

Fig. A. Les arènes de Nîmes, haut lieu des joutes d’Intervilles.

[ɛ̃tɛʁvil] (jeu TV.)
Allez, allez, pas de manières entre nous : tout suranné qui se respecte a regardé Intervilles, voire même s’est bien marré devant les vachettes encouragées par Guy Lux et Léon Zitrone à encorner les fesses de l’autochtone. Ne me racontez pas de blagues ! Je sais que vous avez regardé Intervilles.

Le pitch comme on ne dit pas encore à cette époque surannée de l’ORTF est une allégorie quintessentielle sur l’esprit de clocher qui peut agiter jusqu’au drame nos villes et nos villages¹.

Deux charmantes bourgades de nos belles provinces s’affrontent dans des joutes plus ou moins viriles et ridicules à coup de tartes à la crème et de chutes dans l’eau savonneuse. L’objectif est, comme toujours par chez nous, de savoir qui a la plus grande. Et, selon une scansion régulière visant à rappeler à l’homme qu’il n’est qu’un modeste rouage du règne animal, on lâche les vachettes.

« Lâchez les vachettes ! » hurle la foule.

Juge de paix aveugle sans peur ni parti-pris, la vachette enverra valdinguer les hérauts du village d’en haut, les fiers à bras du village d’en bas, dans un ballet commun dont aucun ne sortira vainqueur. Il faut dire que quatre pattes portant deux cents kilos de muscle et deux cornes ça calme les entêtés. Le ménage fait, la vachette regagne ses pénates et les figures locales encore endolories reprennent leur championnat. La vachette reviendra, ainsi va Intervilles.

Si le spectacle est sur la piste il l’est aussi au microphone. Derrière l’accessoire sonore s’agitent deux ténors : Guy Lux et Léon Zitrone. Mastodontes télévisuels ces deux-là s’affrontent eux aussi dans l’arène. Haussant le ton plus d’une fois à son tour chacun pourfendra l’autre à qui mieux mieux, la speakrine-vachette Simone Garnier ne faisant cette fois pas le poids. Un beau spectacle comme on n’en fait plus.

La légende électorale raconte que tout maire d’une commune vainqueur d’Intervilles est réélu ad vitam aeternam avec reconnaissance infinie des électeurs et statue de bronze sur la place. Il faut dire qu’humilier Mont-de-Marsan au jeu de la planche savonneuse ou ridiculiser Saint-Amand-les-Eaux au lancer de tartelettes géantes ça pose son édile.

Panem et circenses, ça fait plus de deux mille ans que ça fonctionne, ça n’allait pas s’arrêter parce qu’on a la télé !

¹En cas de doute sur ma parole vous me relirez Pagnol pour demain.

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