Lourpidon [luʁpidɔ̃]

Lourpidon

Fig. D. Blonde et son prince crapaud. Allégorie.

[luʁpidɔ̃] (n. fem. SORCEL.)
Que vous l’appeliez lourpidon ou vieille sorcière ne dépend que du fait que vous soyez suranné ou non. Dans les deux cas elle a hanté vos nuits d’enfance et peut-être même encore vos nuits d’ici. Selon votre imagination elle a les doigts crochus et une immonde verrue trône sur son nez ou elle arbore une crinière de jais dans une combinaison latex qui ne cache pas ses effets. Quoi qu’il en soit elle vous effraie. Et vous avez raison, méfiez-vous de la lourpidon.

La vilaine lourpidon est autant nécessaire à la bonne marche de toute société que l’est la ravissante Blanche-Neige (ou la Barbie, la bimbo, la Kate Moss, la blonde, la princesse enfin bon vous voyez) : toutes deux défoulent les foules.

Méchante et laide, ou bien méchante et belle, la lourpidon est pourchassée par les cultes installés qui lui assurent une place sur le bûcher dès l’instant où elle est capturée.

Dès 1435 (on est dans le très suranné) le Formicarius de Johannes Nider nous enseigne que les sorcières font cuire des enfants dans de grandes marmites et créent ainsi de sombres potions aux pouvoirs diaboliques. En conséquence de quoi il était préférable de procéder à leur éradication. Ça partait bien…

Cinquante ans plus tard le Malleus maleficarum de deux autres dominicains allemands nous explique comment capturer, juger et éliminer ces lourpidons. En deux siècles 200 000 personnes seront soumises à la question et occises avec balais et vieux grimoires. On ne rigolait pas avec l’ordre des choses à l’époque.

On en était encore à ce stade là quand surgit au milieu d’années tout autant surannées (les 60’s) Samantha, une sorcière pour une fois bien-aimée. La ravissante Elizabeth Montgomery agitera son joli nez retroussé pendant huit saisons télévisées sans jamais pour autant frôler l’écartèlement ou toute autre forme de question suppliciée. Tant mieux, ça m’aurait ennuyé (j’étais secrètement amoureux de cette belle lourpidon).

Eh oui, je peux bien l’avouer, je n’ai jamais eu peur des sorcières. Si leurs pouvoirs sont bien réels (je peux témoigner être passé du stade de prince charmant à celui de crapaud et avoir vu une princesse préférer rejoindre un château au-delà des mers plutôt que monter sur mon fougueux destrier), ils ne sont pas pour autant maléfiques, rassurez-vous. Les philtres qu’elles concoctent ne sont faits que d’amour mais la recette est compliquée c’est pourquoi elles se cachent pour nous les préparer. Des fois ça prend du temps, ça mijote. La lourpidon a tout son temps puisqu’elle va vivre mille ans.

Pas moi.

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