Avoir du vice dans la toupie [avwar dy vis dâ la tupi]

Fig. A. Têtes blondes et toupies.

[avwar dy vis dâ la tupi] (loc. vic. MALI.)

Alors qu’il n’y avait a priori aucune raison de remettre en cause l’innocence d’une sage tête blonde s’escrimant à contredire la loi sur l’équilibre d’un corps en mouvement, en l’occurence celui de sa toupie de fer blanc, la langue surannée a tenu à mettre son grain de sel dans la partie.

Elle a donc assemblé avoir du vice dans la toupie pour semoncer le gros malin qui se tire toujours d’affaire grâce à ses pirouettes hardies.

Avoir du vice dans la toupie est en effet une expression d’avertissement quand elle est décochée. Qu’elle se réfère à l’un des plus vieux jouets connus (les enfants y jouent depuis l’Antiquité) est un leurre : la toupie est la tête dans l’argot des faubourgs (en sus de signifier aussi la femme de mauvaise vie, mais ceci est une autre histoire) et qui a du vice dans la toupie a donc la caboche retors et les idées tordues suffisamment pour toujours retomber sur ses pieds.

C’est bien un paroxysme – celui du dérèglement du sens commun en l’occurence – qui est atteint par celui qui a du vice dans la toupie. Pour un esprit raisonnant il est évident que cet équilibre précaire viendra bientôt mordre la poussière conformément à la vertueuse loi universelle de la gravitation et son application sur l’énergie potentielle d’une sphère homogène (cf. ci-dessous).

Rien de cela pour celui qu’anime sa madrerie. Lapin de corridor ou bon apôtre, il se sortira de tout péril.

Aussi rusé soit-il, le vicelard n’avait pas vu venir les modernes distractions qui vont envoyer sa toupie rejoindre en surannéité ces autres jeux usant de la gravitation : bozo-bozo, yoyo, tac-tac

À peine le premier jeu vidéo débarqué sur terre, voici avoir du vice dans la toupie inutilisable pour cause d’incompréhension. Et aucun bimbelot pour prendre sa place.

Avoir du vice dans le Space Invaders ou avoir du vice dans le Rubik’s Cube ne tenteront même pas d’exister, trop sûrs du désaveu qui les guettait.

L’expression disparaît.

Le chafouin contemporain ne s’en porte pas plus mal.

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