Être un chanteur de la chapelle Sixtine [ètr û Sâtër de la Sapèl sikstin]

Fig. A. La chapelle Sixtine. Détail des attributs d’Adam.

[ètr û Sâtër de la Sapèl sikstin] (loc. dépréciat. EUNU.)
En avoir ou pas s’avérant – après étude – être la préoccupation de l’homme depuis son expulsion du jardin d’Eden où la question ne se posait pas, il semble que ce soit très rapidement que l’absence testiculaire ait été considérée comme négative.

Si l’expression être un chanteur de la chapelle Sixtine aide à la datation de l’ablation des gonades comme sujet de moquerie (Clément VIII autorisant officiellement à la fin du XVIe siècle que l’on élague ad honorent Dei les petits chanteurs doués pour qu’ils conservent leur voix de sporanistes), il est plus que probable que depuis plusieurs millénaires on se gaussait déjà de l’eunuque et de son timbre cristallin.

L’incommodé s’avérant rare à l’état naturel, il semblait alors de bon ton de s’assurer d’un chœur de haute volée à disposition de la pompe papale et de la distinguer ainsi de la moindre messe de campagne célébrée au son d’un vulgaire cantique marmonné par des grenouilles de bénitier chantant comme des casseroles. Quitte à louer le seigneur, autant que ça sonne juste.

Aussi fut-il opéré sur les jouvenceaux ce qu’il fallait pour que leur mue ne se fasse pas telle celle du premier adolescent boutonneux venu.

Cet aménagement eu des résultats si spectaculaires qu’être un chanteur de la chapelle Sixtine devint rapidement le synonyme d’avoir une tessiture similaire à celle de la soprano féminine, et conséquemment de ne pas s’apparenter à un modèle de virilité.

Bien avant que « grosse voiture, petit zizi » n’emporte la palme de la moquerie, être un chanteur de la chapelle Sixtine tenait donc le haut du pavé en matière de déni de puissance.

Même le célèbre plafond réalisé par Michel-Ange permettant d’admirer un Adam décontracté porteur de tous ses attributs (cf. fig. A.) ne parvint pas à rehausser le niveau de testostérone et à remettre en odeur de sainteté ce chanteur de la chapelle Sixtine. Pour tous il n’était qu’un châtré, un couillon.

🎶Il était une fois, toi et moi, n’oublie jamais ça, toi et moi¹

L‘été 77 et la voix de fausset d’un Michel Polnareff écrivant sa Lettre à France allaient envoyer soudainement être un chanteur de la chapelle Sixtine en surannéité.

En balançant d’entrée de jeu son il était une fois, toi et moi, n’oublie jamais ça, toi et moi¹, celui qui avait montré ses fesses et prouvé au passage qu’il était un homme un vrai avec tout ce qu’il faut là où il faut, remettait les aigus à l’honneur, ouvrant la voie et la voix aux envolées de Bee Gees fiévreux les samedis soirs ou à la folie d’un Freddie Mercury sur Bohemian Rhaposdy.

L’homme moderne pouvait alors avouer que depuis que je suis loin de toi, je suis comme loin de moi et je pense à toi là-bas, oui j’ai le mal de toi parfois, même si je ne le dis pas, je pense à toi tout bas¹, sans être brocardé.

¹Paroles Jean Loup Dabadie / Michel Polnareff © EMI Music Publishing France, BMG Rights Management.

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