Arriver en quatre bateaux [arivé â katre bato]

Arriver en quatre bateaux

Fig. A. Voiles sur le Nil, ah aaah.

[arivé â katre bato] (exp. ostent. APPAR.)
Bateau et grand apparat se rencontrent vraisemblablement pour la première fois il y a cinq mille ans avec la barque solaire de Khéops et ses quarante-trois mètres cinquante de long, proue à cinq mètres et poupe à sept.

Bien que l’homme navigue sur les flots depuis longtemps, le deuxième roi de la IVᵉ dynastie de l’Ancien Empire connu pour son goût de l’ostentatoire (il est celui qui commandera la grand pyramide de Gizeh), est donc potentiellement le créateur malgré lui de l’expression arriver en quatre bateaux qui transcrira encore des milliers d’années plus tard cette propension unique chez certains à se donner de grands airs et à se faire remarquer.

Autant est-il certainement compréhensible que pharaon se déplace avec une certaine pompe (après tout le roi est aussi un dieu), autant l’arrivée en quatre bateaux du responsable de la photocopieuse à la réunion trimestrielle sur les moyens généraux ou l’entrée façon l’ai-je bien descendu de Marcel au Balto semblent moins justifiées par l’importance de leur fonction respective. Régner sur le Ricmuche ou le stock de papier n’est pas la même chose que sur l’Égypte.

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C’est d’ailleurs pour adresser une certaine moquerie aux empesés de la gourmette qu’arriver en quatre bateaux est traduite du complexe système d’écriture hiéroglyphique (cf. ci contre) pour aboutir telle quelle dans l’alphabet latin.

Dès 1824 et la publication du Précis du système hiéroglyphique des anciens Égyptiens de Jean-François Champollion, arriver en quatre bateaux cingle vers le succès tant les occasions quotidiennes de l’utiliser sont nombreuses.

Notons qu’arriver en quatre bateaux ne nécessite pas d’avoir le pied marin et peut tout aussi bien tancer le rodomont à véhicule rutilant que le hâbleur à chaussures scintillantes aimant annoncer leur arrivée avec strass et paillettes. C’est bien là toute la force de la locution : demeurer accessible par toutes voies.

Les nécessités d’une époque qui va vite et ne peut donc se permettre de glander en croisière toutes voiles sur le Nil – Ah Aaah – déployées, couleront arriver en quatre bateaux.

Pour autant, le criailleur, lui, ne suivra pas l’expression en surannéité.

Il use à présent d’effets plus modernes pour se faire annoncer.

Motards à sirènes hurlantes, gyrophares impérieux, tapis rouge et photographes à flash incorporé forment désormais l’équipage d’un puissant qui n’a rien gagné à passer pour bling-bling plutôt qu’à arriver en quatre bateaux.

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