Avocat du Diable [avòka dy djabl]

Fig. A. « Vautré dans le stupre de son vivant, il ne saurait s’asseoir parmi les saints ». Procès en canonisation d’un anonyme. Musée du Vatican.

[avòka dy djabl] (n. comp. ALLELUI.)

Pour ceux qui pensaient passer une postérité béate en se la coulant douce au Paradis parmi les saints, il y a des démarches à faire. Vous croyiez quoi ? Que les portes du septième ciel allaient s’ouvrir comme ça ?

Phobiques administratifs s’abstenir car il va vous falloir en remplir du papelard, du formulaire en double exemplaire, et il va vous falloir en fournir de la photographie sans sourire¹ et du certificat de ci de ça. Pire encore, vous croiserez sur votre chemin le fameux avocat du Diable qui n’est pas qu’une vieille formule surannée désignant le contradicteur obligé : le bonhomme a bel et bien existé.

Depuis Sixte V (notez qu’on peut être pape et s’avérer un sacré rigolo en décidant de s’appeler Sixte V, mais ceci est une autre histoire), l’advocatus diaboli ou avocat du Diable, a en effet pour charge d’empêcher le moindre gugusse ayant partagé un morceau de pain avec ses semblables de rejoindre le Paradis en tant que VIP. L’avocat du Diable est en quelque sorte un empêcheur de canoniser en rond qui cherche la petite bête pour envoyer au Purgatoire voire en Enfer, le candidat qui a vraiment trop poussé mémé dans les orties (pensées impures, jurons, alcools, voitures qui vont vite, grosses noubas, etc.).

C’est que la place est chère, alors il pave de toutes ses fielleuses et bonnes intentions le chemin qui mène droit chez son patron et qui feront capoter la canonisation de celle ayant entendu des voix ou de celui dont l’incantation aide à retrouver ses clefs de voiture qu’on a encore perdues².

Et ainsi, de 1587 à l’orée de la modernité l’avocat du Diable va-t-il savonner la planche à des centaines de pauvres hères pas assez pistonnés pour finir au firmament.

Le 25 janvier 1983, le prélat en fonction signe le Divinus perfectionis Magister qui envoie l’appellation avocat du Diable au Paradis des mots surannés. Bien entendu, en quatre siècles l’avocat du Diable est devenu un peu païen, mais cette constitution apostolique vaut bien fin officielle des objecteurs en tout et des débatteurs systématiques pour rien. Qu’ils soient croyants ou non.

D’un trait de plume disparaît l’avocat du Diable, ce qui est déjà un peu le Paradis.

¹Que peut-on véritablement attendre d’une administration qui vous ordonne de ne pas sourire sur vos photos d’identité ?
²Que celui qui n’a jamais demandé à Antoine de Padoue où étaient encore passées les clefs nous jette la première pierre.

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