Pelle-à-cul [pelaky]

Fig. A. Pelle simple.

[pelaky] (n. com. JARD.)

Tout comme les enfants chez Jacques Martin (L’École des fans, 1977-1998), les mots surannés sont fooormidables. Et tout comme les enfants, les mots surannés ne prennent pas les détours de la bienséance pour faire savoir ce qu’ils ont à dire. Telle est pelle-à-cul.

La pelle-à-cul est vulgaire en expression, gauche en fonction et fruste en exposition.

Pour le vulgaire vous aurez saisi dès l’énoncé : même sans trop faire sa mijaurée, le cul relié par traits d’union à la pelle n’a pas beaucoup de partisans pour le trouver élégant. Si vous ne la trouvez pas gauche, c’est que vous n’avez jamais posé votre digne séant sur une pelle-à-cul ; en inconfort ce siège de jardin inventé en 1927 (donc c’est suranné) pour permettre aux femmes jardinières de se reposer relève du grand art.

En un mot comme en cent, il fait vraiment mal aux fesses. Son design est des plus fruste puisqu’il n’a dû faire l’objet d’aucune étude se pliant certainement aux contraintes imposées par l’outil de fabrication et à l’inutilité perçue de telles recherches, si maintenant on se met à penser au confort des utilisateurs on n’est pas sorti de l’auberge (1927 vous ai-je dit).

La pelle-à-cul est donc un genre de chaise de jardin, simple à souhait, pouvant tout aussi bien servir de pelle que de repos fessier. Je m’étonne au passage que la créativité snobo-boboïsante ébahie par l’antan n’ait pas remis au goût du jour l’objet, qui plus est en le valorisant au prix du platine puisque l’idée nous provient du siècle précédent. La pelle-à-cul by Starck au Rancon Shop en série limitée au prix exceptionnel de 2400€ l’unité, ça vous dit ?

En effet, la seule émanation récente de la pelle-à-cul est un instrument qui contribue très largement à renforcer son statut suranné : une luge de plastique de la plus simple conception, remisant au rang sophistiqué celle de bois et ses patins d’acier. Ce faisant, la pelle-à-cul est devenue l’instrument des garnements glissant sur les pentes Montmartroises lorsque la neige les recouvre. Croyez-moi sur parole, la descente de la rue Lepic en pelle-à-cul ça vaut son pesant de cacahuètes et ça vous pose un poulbot.

Réchauffement climatique oblige, pelle-à-cul devrait donc un peu plus s’effacer dans les strates surannées, mais est-ce là un grand mal ? Des fois le suranné gagne à rester caché, et c’est moi qui le dis.

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