Il connaît pas Raoul [il kɔnɛ pa ʁaul]

Fig. A. Raoul. Du temps du cinoche, du vrai.

[il kɔnɛ pa ʁaul] (exp. CINE.)

In extenso : « Mais il connaît pas Raoul, ce mec ! Il va avoir un réveil pénible. J’ai voulu être diplomate à cause de vous tous, éviter que le sang coule. Mais maintenant c’est fini, je vais le travailler en férocité, le faire marcher à coup de lattes ! À ma pogne, je veux le voir ! Et je vous promets qu’il demandera pardon, et au garde-à-vous ! ».

Celle-ci compte parmi les répliques les plus surannées du cinéma mondial. Oui, je le dis, je le redis et je le confirme.

Il connaît pas Raoul est entrée en surannéité avec le recul cinématographique du noir&blanc, la disparition quasi complète des comédiens avec une gueule et du talent dedans, et l’extinction des écrivains à textes, conjointe à l’abandon du cinéma aux mains de producteurs devenus uniquement financiers spéculateurs et paradoxalement sans bourses.

Il n’en fallait pas plus pour pousser il connaît pas Raoul dans les ciné-clubs de quartiers ou pour le coller sur les bandes magnétiques des cassettes vidéo à magnétoscoper les soirs de pluie. Raoul Volfoni, truand de son état, grande gueule qui ne se ferme qu’au bourre-pif, sis à Pantruche, est le type que la parole désigne comme l’inconnu qui gagnerait à l’être moins. A des fins de bonne santé pour l’ignorant, vous l’aviez bien compris.

La tournure exclamative du constat désabusé et chafouin est goûteuse comme une boisson d’homme. Il connaît pas Raoul est une prière désespérée devant la naïveté du chien dans un jeu de quilles et un appel à une prise de conscience salvatrice du blasphémateur. C’est aussi le chant du cygne de la gérontocratie outrée, le baroud d’honneur des anciens face aux modernes. C’est suranné, quoi…

 

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