Smoking jacket [smɔkiŋ ʒakɛ]

[smɔkiŋ ʒakɛ] (angl. BONNET.)
Fig D. Vos luttes partent en fumée. Alain Bashung.

Fig D. Vos luttes partent en fumée. Alain Bashung.

I should have written this chronicle in english but my french is better. Je continuerai donc en français. Ce sera plus facile car nous allons aborder les subtilités de la mode et de l’étiquette que des approximations translatives ont détruites, les vouant ainsi au suranné, et je ne voudrais pas être l’un de ces modernes fossoyeurs.

Le pièce de tissu du jour est tout autant l’un des surannés du vestiaire masculin qu’une manière d’être dont on pourrait dire qu’elle fut heureusement éteinte par une vigilante politique de santé publique puisque, je vous le rappelle, fumer tue. Mais tout n’est pas si simple en ce bas monde…

La smoking jacket est une veste qui se porte dans certaines conditions et qu’il s’agit tout d’abord de ne pas confondre avec la veste d’intérieur en soie matelassée sous peine de commettre un grave impair qui vous vaudrait moue et réprobation.

Comme son nom l’indique la smoking jacket est une veste simple portée dans les fumoirs afin de ne pas déposer la très désagréable odeur du tabac froid sur son costume. Son utilisation présuppose l’existence d’un fumoir, lieu lui aussi tombé en désuétude mais dont on aperçoit quelques résurgences dans les aéroports, les restaurants gastronomiques ou encore dans des pays où l’interdiction de fumer dans l’espace public est dûment respectée¹.

À son origine surannée que l’on date de 1850 environ, la smoking jacket fut imaginée en velours de soie ou de coton, une matière supposée éliminer rapidement les odeurs. Elle est dotée d’un large col châle de satin ou de faille de soie matelassée² qui permet à la cendre de chuter négligemment et de ne pas brûler les vêtements. La chute de cendre (de cigare ou de cigarette) est un art qui demande des années de pratique pour en envisager la maîtrise. Elle se pratique chez le philosophe trop emporté dans ses profondes pensées pour avoir celle d’user du cendrier, chez le businessman trop occupé par une conversation à plusieurs millions pour tendre le bras et faire tomber ailleurs cette cendre futile. L’étiquette réprouve vertement celui qui se la joue, crétin mondain voulant passer pour un homme de bien, et qui avec une cigarette au bec conservera volontairement un long trait de tabac consumé bientôt appelé à choir par la loi universelle de la gravitation.

Le corps de la veste est en laine ou en velours de soie, et sachez que le vert ou le violet profond sont les couleurs qui conviennent, n’en déplaise aux créateurs modernes obligés de porter des lunettes de soleil à force de travailler sur du fluorescent. Comme la smoking jacket ne revendique aucune légèreté, vous l’aurez bien compris, elle peut même s’orner de passementerie, de larges revers de manches, de boutons de soie et d’un fermoir Brandebourg plus facile à fermer après un dîner apprécié.

La smocking jacket se vêt évidemment à la place de la veste de dîner (ou plus prosaïquement du queue de pie), exclusivement au fumoir. Ne portez jamais une pièce sur l’autre, vous imaginez bien le ridicule ! Pour enfiler sa smoking jacket, le gentleman trouvera en entrée de la pièce réservée à la pipe et au cigare un dressing où elle est accrochée.

Enfin, la smoking jacket n’est évidemment pas à confondre avec la veste de smoking (tuxedo en angliche) autre atout vestimentaire masculin qui, s’il est bien porté, flattera le commun (dont je suis).

À condition bien entendu de ne pas mettre les mains dans les poches, mais ceci est une autre histoire d’attitude surannée que je ne manquerai pas de vous conter un jour.

 

¹À Tokyo par exemple on trouve des fumoirs dans la rue. Ces lieux fermés, de la taille d’un abribus, permettent aux fumeurs de s’intoxiquer tranquillement sans polluer l’air commun.
²D’où la confusion commune avec la veste d’intérieur faite quant à elle uniquement de cette matière.

 

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