Porter les armes de Bourges [pòrté léz- arme de burZ]

Fig. A. Guerriers Gaulois devant Avicarum.

[pòrté léz- arme de burZ] (loc. verb. GAUL.)

Il y a polémique sur le blasonnement de la bonne ville de Bourges.

« D’azur, à trois moutons passants d’argent, à la bordure engrêlée de gueules, au chef d’azur chargé de trois fleurs de lis d’or » pour les uns, « agneau Pascal avec une croix d’argent en champ d’azur » pour les autres, et enfin « âne assis dans un fauteuil » pour quelques marginaux.

Un âne qui marquera le langage en devenant la cause de l’expression porter les armes de Bourges.

Explications.

Selon certains sachants de l’histoire de la guerre des Gaules, Avicarum (future Bourges) dut son salut au fait qu’Asinius Pollio, gouverneur mis en place par César, empêché de combattre par une crise de goutte, rejoint ses hommes en débandade assis sur son siège et les harangua si bien qu’il repartirent au mastic et finirent par bouter le Gaulois belliqueux hors de la ville.

Avec le temps Asinius devint asinus (l’âne) et l’histoire retint qu’un âne assis sur un siège avait sauvé la ville. Des fois, l’histoire…

Porter les armes de Bourges devint alors le meilleur synonyme de regarder les autres bosser bien confortablement installé le séant vissé dans un fauteuil, certainement encouragé dans son expansion par un esprit gaulois toujours vexé de s’être fait botter le train par les Romains¹ et faisant feu de tout bois pour nuire à la mémoire de Jules.

Mais peu importe le cheminement tortueux de l’expression, ce qui compte c’est que porter les armes de Bourges est loin d’être va-t-en-guerre mais au contraire bien peu pressé de s’agiter. Porter les armes de Bourges c’est même diriger sans se mouiller et surtout sans compétences.

Une métaphore complexe, peu amène pour la paisible préfecture du Cher qu’elle réussira à force de travail à envoyer en surannéité, très largement aidée par le développement des techniques managériales modernes qui font que désormais un incompétent assis dans un fauteuil en cuir peut aisément passer pour un leader grâce à deux ou trois effets PowerPoint™ bien sentis².

Ainsi, en 1990, lorsque sort la première version du logiciel d’exposé susnommé compatible avec Windows 3.0, la cause est entendue : porter les armes de Bourges ne charrie plus aucun sens péjoratif.

S’appuyant sur un écrit du brillant Gaspard Thaumas de la Thaumassière (1631-1702), la ville de Bourges clame haut et fort³ que « de tems immémorial, elle porte d’azur à trois moutons passans d’argent, acornez de Sable, acollez de gueules clarinez d’or, deux un ; on a depuis peu ajouté un chef cousu de France, et pour supports un Berger et une Bergère avec leurs houlettes, et je ne pense pas qu’elle ait jamais eu d’autres Armes ».

Elle est désormais la seule à porter les armes de Bourges. Sans passer pour un âne. C’est fort.

¹Le Gaulois est rancunier. In Astérix n°15, La Zizanie. René Goscinny, Albert Uderzo, Ed. Dargaud. 1970.
²Entrée en rotation + agrandir/rétrécir + son de Formule 1 au démarrage = succès garanti.
³Source : site Internet de la ville de Bourges.

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