Catégorie : Pensées

À plus dans le bus [a ply dâ le bys]

À plus dans le bus

Fig. A. Ce n’est qu’un au revoir.

[a ply dâ le bys] (salut. cord. REVOI.)

Les poètes régnaient alors en maîtres, comblant de leurs rimes aux richesses parfois discutables un peuple qui aimait les lettres plus que les chiffres et la rentabilité.

Avoir des heures de vol [avwar déz- ër de vòl]

Fig. A. Lana Turner à l’âge de deux fois dix-huit ans.

[avwar déz- ër de vòl] (loc. moq. ÂGE.)
« Mesdames et messieurs, dans quelques instants nous atterrirons à l’aéroport international de Rio de Janeiro-Galeão, la température au sol est de 29°. Nous espérons que vous avez passé un agréable… » nous susurre la voix légèrement éraillée par douze heures de vol d’un phantasme en Balenciaga, Pierre Cardin, Courrèges ou Dior (qui est cependant une autre histoire).

Donner de l’eau bénite des passants [dòné de lo bénit dé pasâ]

Fig. A. Fiole d’eau bénite de Lourdes donnée.

[dòné de lo bénit dé pasâ] (loc. belliq. ALLELU.)

Certaines nobles filiations linguistiques ne confirment pas tous les espoirs mis en elles. On peut en effet être une expression dont les fondations furent creusées par Horace (le poète), posséder une structure qui semble des plus quiètes et s’avérer être une forme d’agression.

Avoir une voix de mêlécasse [avwar yn vwa de mélékas]

Fig. A. Si ce soir j’ai envie d’me casser la voix.

[avwar yn vwa de mélékas] (loc. cass. PATRIIIIC.)

En 1989 le poète se rebiffait, crâneur, dans l’une de ses chansons déchirantes qui précisément déchirait (ce sans quoi elle n’aurait pas réellement été déchirante, mais ceci est une autre histoire) les oreilles : si ce soir j’ai pas envie d’rentrer tout seul, si ce soir j’ai pas envie d’rentrer chez moi, si ce soir j’ai pas envie d’fermer ma gueule, si ce soir j’ai envie d’me casser la voix¹, peut-être sans savoir qu’en des temps un peu plus surannés il eût dû trouver une rime un tantinet plus riche pour terminer sur si ce soir j’ai envie d’avoir une voix de mêlécasse.

Manger du lapin [mâZé dy lapê]

Fig. A. Lapin chasseur au menu.

[mâZé dy lapê] (métaph. CIMET.)

Le lapin est certainement l’animal le plus populaire des expressions surannées tant il est mis à contribution par la langue d’icelles.

À la gomme [a la ɡòm]

À la gomme

Fig. A. Gommeux composant une chanson à la gomme.

[a la ɡòm] (inv. NUL.)

Le registre dépréciatif suranné a posé sur les marches les plus élevées de son échelle une expression qui dissimule bien sous son aspect simplet le plus profond mépris.

Être Chocolat [ètre Sòkòla]

Fog. A. Foottit et Chocolat.

[ètre Sòkòla] (loc. verb. CIRQ.)
SYN. Être floué, berné, s’être fait avoir.

George Foottit et Rafael Patodos étaient copains comme cochons. Les deux lascars s’étaient rencontrés en 1895 à Paris et avaient conquis le public grâce à leurs numéros comiques qu’ils exécutaient sur la piste du Nouveau Cirque, rue Saint-Honoré.

Laisser la cuillère dans la tasse [lésé la kÿijèr dâ la tas]

Fig. A. — Attention Charles, ne laissez pas la cuillère dans la tasse ! — Ah ah ah, ne vous inquiétez pas Marie-Madeleine, je prends mes précautions.

[lésé la kÿijèr dâ la tas] (loc. verb. SAV. VIV.)

Qu’il s’agisse de thé ou de café, les bonnes manières surannées imposent de tourner la petite cuillère dans la tasse sans faire le moindre bruit¹ puis de la poser sur la soucoupe avant de déguster la boisson. N’en déplaise aux gougnafiers, c’est ainsi que la chose se fait, qui plus est sans lever le petit doigt.

Il est en sus hors de question de laisser la cuillère dans la tasse.

Avoir un ticket [avwar û tikè]

Fig. A. Homme ayant un ticket (en main droite).

[avwar û tikè] (loc. verb. AMOU.)

L‘administration publique et ses arcanes peuplées de formulaires à remplir au stylo Bic sans dépasser des cases et en appuyant bien fort pour que le papier carbone fasse son office reproducteur, a parfois eu d’étranges conséquences sur le langage suranné.

Et mon cul c’est du poulet ? [é mô ky sè dy pulè ?]

Fig. A. Poulet sidéré.

[é mô ky sè dy pulè ?] (quest. réth. COT.)

Entre doute poli et sidération absolue existe une zone trouble que le français classique avait du mal à irriguer de ses interjections trop imprécises.

Un « quoi ?! », même suivi de points d’interrogation et d’exclamation, tâtonne. Un « mais c’est pas possib' » se contente de déplorer et un « tu m’en diras tant… » joue de son clair-obscur pour précisément ne pas en dire tant que ça.